Douceur angevine, domaine de Pignerolle et jolies bagnoles… Voilà un cocktail qui pourra peut-être redonner le sourire à toutes celles et ceux qui disent : « je hais les dimanches ! » Savoureux et gratuit, il se laisse déguster à l’apéritif lors du premier repos dominical du mois, aux alentours de onze heures… Les ingrédients : végétation d’exception, patrimoine architectural et carrosseries sur leur 31 !
Ah ! La douceur angevine… Pour peu que vous la quittiez, vous prenez conscience de son attrait. Et quand vous avez la chance d’en profiter tout au long de l’année, vous finiriez presque par vous en lasser. Tant de quiétude et d’harmonie, tant de belle végétation en plein cœur du paysage urbain, tant de bonnes choses à déguster… Cela ne manquerait-il pas un peu de piment ? Moi, je le confesse à présent, c’est ce que je me suis dit très longtemps. Angevin ascendant transalpin, j’ai été très infidèle à l’Anjou durant de nombreuses années et désormais je ne cesse de lui tresser des louanges. Peut-être pour me guérir d’une certaine culpabilité à son égard ? Peut-être en constatant qu’au-delà de la Maine, le vaste au monde manquait singulièrement de douceur…
La douceur de vivre ? L’Anjou l’exprime souvent à travers parcs et jardins, très nombreux par ici. Il y a peu, j’ai eu l’occasion de renouer avec l’un d’entre eux dont le charme m’avait quasiment laissé de marbre jusqu’alors. Il s’agit du domaine de Pignerolle situé à vingt minutes environ du centre d’Angers. Les promeneurs en tous genres et les fanas du jogging s’y retrouvent pour respirer le bon air en s’adonnant à ces saines occupations. Les familles et les enfants y sont aussi les bienvenus puisque l’endroit dispose d’airs de jeux. Quant aux autres, ils peuvent y vivre des pauses déjeuner enthousiasmantes à l’ombre d’arbres majestueux grâce à des tables de pique-nique on ne peut plus accueillantes. Bon, jusqu’ici, rien de plus normal au royaume du végétal… En Anjou, le bien-être semble faire partie du décor. Même si tout le monde sait qu’il faut parfois se méfier des apparences.
En plus de tout cela, le domaine de Pignerolle possède de nombreux autres atouts qui lui confèrent un attrait indéniable. En premier lieu, un château joliment inspiré par l’architecture du Petit Trianon de Versailles (excusez du peu). Quand vous abordez le parc par l’entrée principale, vous pouvez découvrir ce bijou d’élégance ponctué l’allée principale bordée d’arbres. Et cette vision est vraiment séduisante. Aux alentours du château, de nombreux parterres de végétation emblématique de l’Anjou, une splendide orangeraie et d’autres constructions de belle facture, attirent aussi l’œil. De magnifiques buis insolents de vigueur agrémentent également ce havre de paix.
Paisibles… Les abords du château le sont un peu moins le premier dimanche de chaque mois aux alentours de onze heures. Mais que se passe-t-il donc ici avant le repas dominical, rituel si prisé des Angevins ? Eh bien, figurez-vous qu’une armée bien pacifique a la bonne idée de partir à l’assaut du domaine au volant de voitures anciennes mais toujours rutilantes et aguicheuses. Là se donnent rendez-vous des passionnés des belles mécaniques qu’ils retapent, cajolent, bichonnent à longueur d’année. Vedettes d’une parade improvisée, les
véhicules prennent place tout autour du château pour le plus grand plaisir des badauds ou des fervents amateurs. Des plus prestigieux aux plus populaires, tous les modèles se côtoient ici dans une ambiance bon enfant. Et ce ne sont pas forcément les premiers qui font un triomphe. Une modeste 2 cv transfigurée à force de bons soins pourra damer le pion à une DS fatiguée. Suscitant l’admiration des aficionados. Vous l’aurez compris, ici, le public – très majoritairement masculin mais de tous les âges – communie à l’unisson autour des carrosseries reluisantes.
Même si l’on n’est pas forcément un inconditionnel de l’automobile, le spectacle offert par ces « pétroleuses » reste toujours divertissant. Tant la « bagnole », symbole longtemps incontesté de la société de consommation, s’inscrit dans l’inconscient collectif. Réveillant tout un tas de souvenirs pour quiconque se retourne en arrière. Évoquant pour les plus récentes, les épisodes marquants de nos vies. Et pour les plus anciennes, témoignant à nos yeux d’un passé à jamais révolu. À ce propos, j’ai pu notamment admirer une Amilcar de 1925 (la voiture a donc 92 ans) jalousement chouchoutée par un « mordu » de vieux modèles. Chaque année – au volant de ce bel engin ou d’une autre de ses protégées – ce propriétaire passionné entreprend des rallyes à travers la France en compagnie des plus belles femmes de son entourage. Cheveux au vent et foulards autour du cou, ces valeureux voyageurs démontrent s’il en était besoin que les dernières avancées de la technologie font souvent pâle figure comparées à l’indéniable poésie qu’inspire un modèle tout droit sorti des années 20.
Et que dire des 4 cv toutes pimpantes, des « Cinquecento » belles à croquer, des 403 et des Tractions qui en imposent ? Dans ce joyeux carrousel, un modèle semble rallier tous les suffrages : la Ford Mustang dans sa version originale. Qu’on l’observe sous n’importe quel angle, la belle américaine a vraiment de la gueule ! Et même s’il ne s’appelle ni Paul Newman ni Steve McQueen, Monsieur Tout le monde, au volant de ce petit bolide, pourrait presque rivaliser avec les plus grands séducteurs. Séducteurs ou non, tous les fidèles de ce rendez-vous improvisé semblent retrouver le parfum de leur jeunesse ou voyager dans le temps au contact de ces voitures nées le plus souvent avant que le pétrole ne devienne une rareté.
Voilà, c’est ça l’Anjou… Vous franchissez l’entrée d’un parc pour y trouver la paix et vous plongez bien malgré vous dans la petite et la grande histoire. À chaque pas au milieu de la verdure, vous respirez les effluves d’essences rares et quelques minutes plus tard, une calandre, un tableau de bord vous permettent de humer le doux parfum de la nostalgie. Cette bonne vieille nostalgie, aussi douce et irremplaçable que la douceur angevine.
Le domaine de Pignerolle est situé sur la commune de Saint-Barthélémy d’Anjou à quelques minutes d’Angers – Concentration de voitures anciennes chaque premier dimanche du mois aux alentours de onze heures autour du château.
> Plus d’informations sur le domaine de Pignerolle ICI –
Enzo Clémot – Scritto ! –