Myriam, la voix d’Elvis pour éclairer sa voie.

En 1976, la jeune Myriam assise sur l’un des bancs mythiques de Graceland (1)

Elvis a accompagné son adolescence et reste une source d’inspiration très présente dans sa vie d’adulte. Myriam voue une admiration sincère et exigeante à l’une des figures les plus importantes de la musique au XX ème siècle. Géographe de formation, c’est également un véritable puits de science concernant la carrière du King. Elle a accepté de parler à bâtons rompus avec nous de cet artiste si particulier et finalement si méconnu, particulièrement dans l’Hexagone. Elle nous livre plusieurs souvenirs émouvants de sa jeunesse provinciale durant laquelle il tenait une place si importante. Avec beaucoup de gentillesse, elle a également effectué pour nous une sélection des CD, des livres et des DVD les plus pertinents concernant la carrière d’Elvis. Vous pourrez la retrouver à la fin de l’interview.

De vous, peut-on dire que vous êtes une inconditionnelle, une admiratrice ou plus simplement une fan d’Elvis Presley ?

En 1956, la fureur de vivre et de chanter.

Même si je ne me suis jamais considérée comme une fan au sens classique du terme, je peux dire que j’aime Elvis, sans aucune restriction. Et sa voix me touche par-dessus tout. Son travail d’artiste m’a aidée à faire mon chemin dans la vie et il reste pour moi une source d’inspiration très présente. Sa musique m’accompagne depuis les années 70. Et à travers lui, mon existence a parfois pris des tours assez inhabituels. À la faculté, j’étais une élève plutôt sage et studieuse. Personne n’aurait pu imaginer que derrière cette façade se cachait une admiratrice inconditionnelle du « performer » le plus important de la musique moderne. Surtout qu’en France,  du moins dans les années 70, Elvis Presley n’avait pas toujours bonne presse. Et d’ailleurs, je suis toujours restée très discrète par rapport à cette passion qui dure depuis le début de mon adolescence. La première fois que j’ai franchi la porte d’un magasin de disques, toute timide, c’était pour acheter un disque du King et le disquaire m’a répondu d’un ton assez désagréable : « On ne vend pas ça ici ! »… Je suis repartie toute décontenancée même si depuis, ma discothèque s’est considérablement enrichie ! Aujourd’hui encore, Elvis conserve la place d’honneur dans mon panthéon personnel. Quand je l’entends chanter, je suis toujours émue. Seule ombre au tableau, je ne supporte pas le culte mercantile qui s’est créé au fil des années autour de lui. Rendez-vous sur le site www.elvis.com, vous comprendrez de quoi je parle ! À travers cet hideux merchandising, on prend les fans pour des abrutis et au final, cela dessert la mémoire d’Elvis.

Pour Elvis, même les jeunes filles de bonne famille poussent la porte des disquaires (2)

Vous appréciez Elvis Presley depuis longtemps déjà… Quels sont les plus grands souvenirs que vous gardez de lui, de sa carrière ?

Des souvenirs, j’en ai beaucoup ! Mais je pense en particulier au show « Aloha

Elvis dans « Jailhouse Rock », très bon film de 1957 (3)

from Hawaï » de 1973 au profit de la lutte contre le cancer, premier concert de l’histoire retransmis en direct par satellite dans 38 pays pour 1,5 milliard de spectateurs soit 40 % de la population mondiale. La France, comme je l’ai dit assez en retrait à cette époque concernant le King, n’en faisait pas partie. Seule la radio Europe 1 a diffusé le show mais j’en garde un souvenir magique. C’était la première fois que je pouvais l’apprécier en live !

Même si elle est tout à fait raisonnée et réfléchie, dans votre cas, on peut probablement parler de véritable passion… Concrètement, comment s’est-elle exprimée ? À travers des lectures, des voyages, des achats, l’appartenance à un club ?…

J’habite en province et il faut se remettre dans le contexte des années 70. La musique et tout ce qui gravite autour était beaucoup moins diffusée qu’à l’heure actuelle. Il n’y avait pas Internet. Aussi, pour accéder à l’univers d’Elvis, il fallait s’en donner les moyens. Pour ma part, en plus de mes études, je travaillais l’été dans une fabrique de bougies et j’économisais. Grâce à l’argent que j’ai gagné, j’ai pu partir à Las Vegas en 1975. J’étais aux anges, sur un petit nuage. Mais je ne savais pas ce qui m’attendait… Au moment où mon avion atterrissait, celui d’Elvis s’envolait pour Memphis. Il était tombé malade dans la

Memphis, au coeur de la vie d’Elvis (4)

nuit. Concerts annulés. J’ai visité la Californie, mais le cœur n’y était pas, j’avais l’impression d’avoir fait le voyage pour rien. D’ailleurs, cet épisode de ma vie n’a pas été anodin. Même si je peux me montrer optimiste, j’ai connu à ce moment-là un premier sentiment d’échec et de malchance dont j’ai du mal à me défaire. Encore aujourd’hui. Mais cette expérience m’a surtout appris à ne jamais renoncer. L’année suivante, je suis repartie ! Et au milieu de l’océan, mon avion a eu un gros problème technique. Retour à Paris (que j’avais quitté 24 H plus tôt) pour Londres où j’avais pris l’avion à destination de Memphis. En effet, l’atterrissage d’urgence à Londres n’était plus possible : les aiguilleurs du ciel anglais s’étaient mis en grève juste après notre décollage ! Finalement, c’est via Chicago que j’ai gagné Memphis et c’est sous un soleil glacial que je suis entrée pour la première fois à Graceland. Ensuite Las Vegas. Notre séjour a duré une semaine et j’ai pu assister à plusieurs shows. Le prix des billets restait tout à fait correct mais pour être bien placé, il fallait donner de généreux pourboires aux placeurs, tous Italiens pour l’anecdote… Le 3 décembre 1976, j’ai pu enfin voir Elvis et le 5 il m’a même fait monter sur scène !

Avec le recul, d’après vous, que reste-t-il de lui aujourd’hui ?

Enfance pauvre, la maison natale d’Elvis Presley à Tupelo, dans l’État du Mississippi (5)

Elvis Presley a vraiment été à l’origine du formidable engouement et de la vraie révolution qu’a connue la musique à la fin des années 50 et au début des années 60. D’ailleurs, tous les monstres sacrés revendiquent son héritage musical : John Lennon, Bruce Springsteen, Bob Dylan entre autres. En France, même Georges Brassens lui tressait des louanges. Il faut dire qu’il avait tout pour devenir une légende : d’une extrême pauvreté au départ, il a atteint le sommet. Et comme il était très religieux, il a certainement vécu toute son existence comme le fruit d’une prédestination même s’il gardait toujours une grande distance par rapport à ce qu’il vivait. Il était animé par une grande spontanéité, une grande fraîcheur d’âme qui lui faisait déplacer des montagnes, bousculer les préjugés. Il a permis à la société des années 50 de s’affranchir de nombreux

En 1956, Elvis en compagnie d’Ed Sullivan, célèbre présentateur de talk show (6)

carcans. Et il a accompagné l’avènement d’une nouvelle masculinité moins caricaturale, moins stéréotypée. Il assumait d’ailleurs avec bonheur une certaine féminité. Cela s’exprimait notamment dans le choix de ses vêtements. Souvent audacieux et colorés. Avec lui, beaucoup de barrières sont tombées. Et pourtant, au départ, rien n’a été simple. Il a d’abord été très contreversé, voué aux gémonies par ses opposants qui le traitaient de « nigger » et qui diabolisaient sa musique, ses prestations scéniques. En 1954, lorsque « That’s all right » a explosé sur les ondes, les États-Unis étouffaient dans la sombre atmosphère du Maccarthysme et la ségrégation raciale sévissait dans le Sud. Elvis a véritablement brouillé toutes les cartes : raciales, générationnelles, sexuelles. Il a ouvert une brèche considérable dans l’obscurantisme ambiant. Il faut savoir qu’en janvier 1957, lors de son passage au Ed Sullivan Show, le plus important variety-show des années 50, les images d’Elvis étaient censurées au-dessous de la ceinture… Difficile à imaginer aujourd’hui. Ce fut son dernier show TV avant 1968 et le « comeback spécial » dont on fête cette année les 50 ans et qui fait l’objet d’une nouvelle réédition en DVD. Performance mythique, ce come back a été classé en 1996 parmi les 10 émissions les plus mémorables de la télévision par le magazine TV Guide.

LE FAN CLUB FRANÇAIS D’ELVIS

www.elvismyhappiness.com : le fan club français qui édite une très belle et très fouillée revue trimestrielle en couleur, organise des pèlerinages à Memphis en août, des concerts…
Pour s’abonner : EMH BP 40568 Le Menil Saint Denis elvismh@aol.com

Le club possède aussi une boutique : « Culture factory My Happiness » 27 rue de l’Armorique – 75015 PARIS – Tél : 01 34 61 24 06

LA SÉLECTION PERSONNELLE DE MYRIAM
CONCERNANT LES SHOWS TV ET LES ALBUMS
ENREGISTRÉS PAR ELVIS PRESLEY

SHOWS TV

  • « 68 Comeback », le grand retour d’Elvis en 1968. A voir absolument,
  • « Aloha from Hawai », concert d’Elvis en 1973, premier de l’histoire retransmis par satellite. 38 pays retransmettront le show en direct pour 1,5 milliards de spectateurs soit 40 % de la population mondiale.

ALBUMS

Les Musts

  • 1954/1955 : The Sun Sessions. Les débuts du Rock,

    Elvis n°1 pour le nombre de « single » classés dans le Billboard loin devant Elton John et les Beatles (7)

  • 1956 : Elvis Presley,
  • 1958-1959-1963-1968 : Elvis’ Golden Records 1-2-3-4,
  • 1968 : Elvis NBC TV Special (68 Comeback),
  • 1969 : From Elvis in Memphis (Album classé parmi les 10 albums du XXème Siècle),
  • 1970 : That’s the way it is,
  • 1971 : Elvis Country,
  • 1972 : Elvis recorded at Madison Square Garden

Les albums religieux

  • 1957 : Elvis’ Christmas album,
  • 1961 : His hand in mine,
  • 1966 : How great thou Art

Les compilations sorties après sa mort

  • 2016 : Elvis Presley coffret The album collection, 60 CD, ce coffret comprend l’ensemble des albums enregistrés par Elvis,
  • 1999 : Elvis Presley Artist of the century, 3 CD, les titres les plus connus d’Elvis.

ELVIS en chiffres et en record
En 1987, le Billboard annonce qu’Elvis a vendu 1,2 milliards de disques. En 2002, Elvis a de nouveaux n°1 avec « A little less conversation » et l’album « Elvis 30 #1 hits » premier dans 26 pays. En 2016, Elvis a de nouveaux n° 1 avec deux CD de reprises avec le Royal Philarmonic Orchestra…

Mais d’abord, un petit tour par Graceland… (www.graceland.com)
Demeure désormais mythique construite en 1939 et achetée par Elvis en 1957.

Graceland : environ 600 000 personnes visitent la maison d’Elvis chaque année… (8)

Le corps d’Elvis Presley repose dans la propriété, devenu désormais lieu de pèlerinage. La maison est ouverte au public depuis juin 1981. Environ 600 000 personnes la visitent tous les ans.
Le domaine comprend plusieurs musées dont un exposant les voitures d’Elvis. Depuis 1984, le « Lisa Marie », l’avion personnel d’Elvis est également ouvert à la visite.
Tous les ans, dans la nuit de 15 au 16 août, a lieu une retraite aux flambeaux. En 2017, 50 000 personnes venues de tous les coins du monde ont défilé devant la tombe d’Elvis durant cette « candle light vigil ».

Le classements des ventes : Elvis n° 1
Entre 1955 et 1996 Elvis a sorti aux USA, 123 singles, 32 albums
Le Billboard, hebdomadaire américain pour les professionnels publie toutes les semaines depuis le 1er janvier 1955 le classement des ventes des singles et albums.
En 2000, il a publié la liste des 100 premiers artistes de 1955 à 1999.

Pour les singles
Elvis est n° 1 pour le nombre de singles classés :
dans le top 40 : 1 Elvis : 114 – 2 Elton John : 59 – 3 Les Beatles : 52
dans le top 10 : 1 Elvis 38 – 2 Les Beatles 34 – 3 Madonna 32

Pour les plus grands nombres de semaines n° 1 : Elvis 80 – 2 Maria Carey 60 – 3 Les Beatles 59

Le Billboard a également classé les 100 premiers artistes par points en fonction du nombre de places atteintes et du nombre de semaines classées.

Pour les singles :
1 Elvis 8067 points – 2 Beatles 4703 – 3 Elton John 4473
Pour les albums :
1 Elvis 15 538 points – 2 Frank Sinatra 12 766 – 3 Les Beatles 10918

En 1954, Elvis, tel qu’en lui-même. (9)


LES LIVRES SUR ELVIS

Biographies

  • « 50 ans avec Elvis » de Jean-Marie POUZENC, éditions Didier Carpentier 2002. Chronologique et thématique. La bible française sur Elvis,
  • « Elvis – un homme, toute la musique »de Jean-Marie POUZENC édition Didier Carpentier 2013. Coffret de deux livres et 2 CD audio, Tome 1 : 1953 – 1968, Tome 2 1968 – 1977. 900 chansons passées au crible,
  • « Elvis Presley, Last train to Memphis, » Tome 1 : Le temps de l’innocence 1935-1958 » de Peter GURALNIK, édition Le castor Astral 2007 pour la traduction française. Peter Guralnik est un spécialiste de la musique américaine. Il existe un tome 2 qui couvre la période 1960-1977. Ce deuxième tome présente beaucoup moins d’intérêt, il sert la légende plus que l’histoire.

Biographie en anglais

  • « Elvis et Gladys » d’Elaine DUNDY, édition University Press of Mississippi 2004. Première édition 1985, Macmillan Publishing Company. MA BIOGRAPHIE favorite. La plus fouillée, la plus captivante qui s’appuie sur des sources non exploitées auparavant.

Beaux livres

  • « Elvis at 21, New-York to Memphis » Alfred WERTHEIMER. Insight Edition 2006. De magnifiques photos d’Elvis,
  • « Rock’n’Roll 34-593 » Fondation Cartier. Catalogue de l’exposition de 2007,
  • « Elvis Treasures » Robert GORDON éditions Random House 2002. Le livre le plus original avec des fac-similés de documents rares détachables, des archives de Graceland et un CD audio d’interviews d’Elvis de 1955 à 1972.

LES FILMS D’ELVIS QUI MÉRITENT LE DETOUR

Elvis Presley et Dolores Hart dans Bagarres au King Créole, son meilleur film selon Myriam (10)

  • « Jailhouse Rock », 1957. Célèbre numéro de danse dont le décor et la chorégraphie seront repris par de nombreux artistes,
  • « King Creole », 1958. Par le réalisateur de Casablanca. Le meilleur film d’Elvis,
  • « Flaming star », 1960. Un film de Don Siegel sans chansons sur les métis indiens,
  • « Blue Hawai », 1961. Une comédie musicale qui inaugure le changement de ton de la carrière d’Elvis. L’album du film restera 20 semaines à la 1ère place au Billboard,
  • « Viva Las Vegas », 1963. Une comédie légère avec de bons « clips vidéo » et de très bons numéros d’acteurs. Ann-Margret est pétillante,
  • « That’s the way it is », 1970. Documentaire sur Elvis à Las Vegas en 1970 et ses premières tournées,
  • « Elvis on Tour », 1972. Documentaire sur Elvis en tournées. Le réalisateur est Martin Scorsese.

LES FILMS DONT ELVIS EST UNE DES SOURCES D’INSPIRATION

  • « Mystery train », drame US de 1989 de Jim Jarmusch. L’errance de deux fans japonais sur les traces d’Elvis à Memphis. Un film très original,
  • « Road to Graceland » drame US de 1998 avec Havey Keitel. Un road movie étrange. Elvis est toujours en vie et sillonne les États-Unis dans la peau d’Harvey Keitel,
  • « El ultimo Elvis », drame argentin de 2012 avec John Mc Inerny. Un film très touchant sur la vie d’un imitateur d’Elvis. Sélectionné au festival de Sundance, primé au festival de San Sebastian, prix de la critique française du Cinelatino.

DOCUMENTAIRES SUR LA CARRIÈRE D’ELVIS

  • « The Great Performances » Un coffret de 3 DVD, disponibles à l’unité. Toute la carrière d’Elvis depuis 1954 jusqu’à son dernier concert. Indispensable.
    « The Great Performances vol 1 – Center Stage »
    « The Great Performances vol 2 – The Man and the Music »
    « The Great Performances vol 3 – From the Waist up »
  • « Elvis in the 50’s » Deux DVD : Elvis in Hollywood et Elvis’ 56. Pour le second DVD qui retrace l’année 56 durant laquelle Elvis explosa aux USA,
  • « Elvis, He touched me, The gospel music of Elvis Presley » Pour découvrir une autre facette d’Elvis,
  • « Elvis the Searcher » document qui retrace la vie d’Elvis, présenté au festival américain de Deauville en septembre 2018. Ce DVD est sorti en octobre 2018 aux États-Unis.

Service militaire : Elvis prête serment à Fort Chaffee le 24 mars 1958 (11)

Crédits photo

  • 1 Photo personnelle Myriam,
  • 2 Photo by Jamakassi on Unsplash,
  • 3 Par Metro-Goldwyn-Mayer, Inc,
  • 4 Photo by PJ Szabo on Unsplash,
  • 5 Markuskun at English Wikipedia,
  • 6 Photographie CBS domaine public,
  • 7 Clem Onojeghuo on Unsplash,
  • 8 Photographie Maha,
  • 9 Polly Webb – cliché promotionnel pour Sun Records,
  • 10 Paramount Pictures,
  • 11 Domaine public