
San Giovanni Battista et sa musique baroque du XVIIe siècle…
Créée en 1675 en l’église San Giovanni des Fiorentini de Rome, l’oeuvre ne comportait à l’origine aucune mise en scène. Afin de préserver la dimension sacrée de l’ouvrage. Comme c’était d’ailleurs le cas pour tous les oratorios présentés à cette époque. Depuis, beaucoup d’eau a coulé sous les ponts de la Ville Éternelle. Désormais, des décors et des créations vestimentaires viennent en appui de la musique et du chant servir ces événements artistiques dans lesquels le profane et le sacré se mêlent et s’entremêlent dans un ballet incessant.
La magie qui traverse les âges !
En ouverture, l’entrée en scène des différents protagonistes – dont certains évoluent au milieu du public – reste un grand moment. Et les costumes, très impressionnants, vont contribuer à la magie de toute la représentation. J’allais dire du « spectacle » même si je ne suis pas sûr que ce terme obtienne l’approbation des spécialistes du genre. Pourtant, au-delà des intentions religieuses de départ et de la mise en relief d’une lutte implacable entre le bien et le mal, cet oratorio offre tous les ressorts propres à provoquer les émotions les plus universelles et à faire palpiter les cœurs. Pour peu qu’ils soient sensibles. Comme à Broadway pourrait-on presque dire… Eh oui ! Devant nos yeux se joue un drame mettant en lumière la complexité des rapports humains, les contradictions et les ambiguïtés portées par les êtres, la violence des passions, le goût du pouvoir, le tragique qui peut s’inviter dans toutes les vies. Bref, tous les ingrédients d’une véritable comédie musicale à succès. Et bien entendu, on ne peut rester indifférent. Si on ajoute à cela le fait que des spectateurs nés au XVIIe siècle pouvaient assister pratiquement aux mêmes représentations et avec la même ferveur (le décorum en moins), on ne peut qu’applaudir à tout rompre.
La musica è daverro bellissima !
Stradella, compositeur à la vie apparemment mouvementée, signe ici une partition servant à merveille le drame qui se déroule en lui insufflant un supplément de théâtralité s’il en avait besoin. Et les musiciens du « Banquet céleste », la formation dirigée par Damien Guillon, semblent éprouver autant de plaisir à jouer qu’ils en offrent au public présent nombreux ce soir-là dans la Collégiale Saint-Martin. Grâce à eux et à tous les artistes occupant la scène, à leur fougue et à leur inventivité, la tragédie qui va lier Jean-Baptiste, Hérodiade la fille, Hérode, Hérodiade la mère, le Conseiller et le disciple de Jean, se pare d’une humanité et d’une profondeur émouvantes. Et s’inscrit aussi résolument dans la modernité.